Les habitants ayant fui Moussol attendent aux postes d'Erbil, mardi 10 juin. Photo:Reuteurs
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Les insurgés sunnites et jihadistes contrôlent Moussol, la deuxième ville irakienne, et Tikrit, la ville de Saddam Hussein. Malgré une avancée moins rapide que la semaine dernière, ils progressent. La chute spectaculaire de ces villes, qui se trouvent seulement à quelques heures de voiture de Bagdad, permet vraisemblablement de matérialiser les objectifs de l’EIIL, celui de créer un Etat islamique en Irak s’étendant jusqu’à la Syrie.
Une guerre civile visible – Une large région menacée
Les jihadistes sont issus des groupes islamiques liés à al-Qaida, mais également des groupes sunnites extrémistes, les anciens adversaires d’EIIL. Après la prise de Moussol, ils ont diffusé sur les réseaux sociaux des vidéos et des déclarations sur leurs motivations.
La situation est rendue encore plus complexe car l’EIIL n’est pas le seul à mener des campagnes militaires en Irak. Les forces kurdes se sont emparées de Kikouk, une ville pétrolière importante.
Ces combats ont chassé pas moins d’un million d’Irakiens de leur territoire. Les Etats-Unis et l’Australie ont évacué leur personnel diplomatique vers les zones plus sûres, et ont recommandé à leurs citoyens de quitter immédiatement le pays.
Les batailles remportées par les rebelles menacent sérieusement l’avenir du pays et inquiètent profondément ses voisins et alliés. Jusqu’à maintenant et bien qu’épaulé par des blindés et des armes américaines, le gouvernement de Nouri al-Maliki n’a pas été capable de réprimer militairement l’EIIL. Washington s’inquiète à l’idée que l’EIIL puisse contrôler des villes diposant de ressources pétrolières et s’emparer des banques à Moussol. La carte du Moyen-Orient devrait être redessinée si un Etat sunnite comprenant la Syrie et l’Irak voyait le jour. On se demande si cela n’inciterait pas les Kurdes de Turquie, de Syrie et d’Iran à se révolter pour fonder leur propre Etat.
Une intervention militaire ou une solution diplomatique ?
Alors que les jihadistes sunnites continuent de menacer Bagdad, le président Barack Obama a examiné les options militaires envisageables pour soutenir le gouvernement irakien sans toutefois avoir pris de décision sur les modalités d'une intervention. Il a averti lundi le Congrès que les Etats-Unis allait déployer jusqu'à 275 personnels militaires pour soutenir et renforcer la sécurité des ressortissants américains et protéger l'ambassade américaine. Après le porte-avions USS George H.W. Bush et son escorte, les États-Unis viennent d’envoyer dans le Golf le navire USS Mesa Verde, avec 550 marines à bord. Une intervention militaire reste cependant l’ultime choix, les Sunnites irakiens étant susceptibles de critiquer la partialité que les Etats-Unis manifestent en faveur du gouvernement chiite.
Londres a, pour sa part exclu lundi toute intervention militaire, mais s’est engagé à faire tout ce qui était possible pour soulager la « souffrance humaine ». L’Arabie Saoudite s’est opposée, elle aussi, à toute ingérence étrangère. Ryad a d’ailleurs affirmé que la politique « confessionnelle» du Premier ministre chiite Nouri Maliki avait mené à la déstabilisation du pays. La Ligue arabe a appelé « toutes les forces démocratiques irakiennes » à coopérer pour faire face à la détérioration de la sécurité dans le pays.
Les causes prévisibles
Selon l’ancien Premier ministre britannique, Tony Blair, la rébellion est à l’origine du sectarisme au sein du gouvernement irakien. De son côté, le secrétaire d’Etat américain, John Kerry a avoué que l’intervention de Washington ne réussirait que si les dirigeants irakiens parvenaient à trouver un consensus.
Le journal américain The National Interest a accusé le Premier ministre Maliki, un chiite, d’avoir marginalisé les Sunnites, compte tenu de ce que les Chiites occupent quasiment tous les postes importants dans l’armée irakienne. Les Sunnites, qui s’opposent à Maliki, ont qualifié son gouvernement de dictature.
De l’avis des experts, l’émergence des combattants liés à al-Qaida résulte de l’invasion militaire américaine en Irak depuis 2003, laquelle a creusé un fossé dans le pouvoir et semé les embryons d’un conflit confessionnel.
Comment sauver l’Irak sérieusement déchiré par ce conflit ? Il s’agit là d’un véritable casse-tête pour toutes les parties !