(VOVworld) - Yingluck Shinawatra, Premier Ministre de la Thailande, donc, devait être présentée ce jeudi devant la commission anticorruption qui l’a inculpée pour négligence dans un programme controversé d’aide aux riziculteurs. Mais outre cette procédure qui pourrait mener à sa destitution, Madame Shinawatra doit faire face depuis l’automne à la colère des manifestants, lesquels ne désarment pas, loin s’en faut. Quelle sera l’issue de la crise actuelle ?
Lancé il y a plus de 2 ans, le programme d’aide aux riziculteurs, qui a conduit le gouvernement à acheter du riz jusqu’à 50% au-dessus du prix du marché afin d'augmenter les revenus des riziculteurs, avait contribué à la large victoire de Yingluck Shinawatra a-ux élections de 2011.
Une politique à effet boomerang
Mais, aujourd’hui, ce programme se retourne contre son instigatrice. En plus d’avoir coûté à la Thaïlande son rang de premier exportateur mondial de riz et plusieurs centaines de milliards de bahts, ce programme aura en effet permis aux détracteurs de Madame Shinawatra de l’accuser de corruption. Il faut dire que le gouvernement thailandais a accumulé des stocks gigantesques sans que le cours mondial du riz n’ait augmenté pour autant, et qu’il se retrouve depuis fin 2013 dans l’incapacité d’honorer ses engagements auprès des riziculteurs, lesquels brandissent désormais l’étendard de la révolte. Pour indication, les dettes gouvernementales sont estimées à ce jour à près de 4 milliards de dollars.
La tension a atteint son apogée il y a deux semaines quand plus de 2 mille paysans en colère sont montés sur leurs tracteurs et se sont dirigés vers la capitale thailandaise pour réclamer la démission de Yingluck Shinawatra. Face aux menaces des manifestants qui avaient envisagé de bloquer l’aéroport international de Bangkok, le gouvernement a décidé de décaisser 16 millions d’euros pour payer près de 4 mille riziculteurs, une somme dérisoire par rapport aux 2 milliards 600 million d’euros promis auparavant.
Une impasse
Son incapacité à payer a sérieusement entamé la crédibilité du gouvernement, y compris auprès de son électorat traditionnel. Jusqu’à présent, le gouvernement interdit tout recours à la force contre les manifestants pour éviter un soulèvement populaire incontrôlable. Au contraire, il tend la main à l’opposition, laquelle lui oppose une fin de non-recevoir aux accents de plus en plus catégoriques. Son meneur, Suthep Thaugsuban, veut en effet remplacer le gouvernement par un «conseil du peuple» non élu chargé d’effectuer une réforme anti-corruption. Mais sur place, côté gouvernemental, le ton devient de moins en moins diplomatique. Récemment, 4 mille responsables des « chemises rouges », des pro-Shinawatra, donc, se sont réunis et ont convenu de changer de stratégie, se disant désormais prêts à marcher sur Bangkok au risque d’une confrontation incertaine avec les manifestants anti-gouvernement.
Si son inculpation devait conduire Yingluck Shinawatra à une destitution, il parait désormais inéluctable que la rue deviendrait le théâtre d’un conflit imprévisible entre « chemises rouges » et « chemises jaunes », un conflit aux allures - déjà - de guerre civile.