(VOVworld) - En abattant un avion russe le 24 novembre, la Turquie a porté un sérieux coup, non seulement à ses relations avec la Russie, mais aussi à l’unité affichée jusque-là au sein de la coalition internationale qui lutte contre le groupe Etat Islamique au Moyen Orient. L’incident est d’autant plus regrettable que l’engagement de la Russie aux côtés de la coalition menée par les Etat-Unis commençait à prendre une dimension intéressante.
Vladimir Poutine et Recep Erdogan, le 16 novembre dernier lors du G20. © YASIN BULBUL / POOL / AFP
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Du pain béni, pour l’Etat Islamique, qui peut ainsi tirer parti des divisions dans le camp adverse...
Que la Turquie ait abattu un bombardier russe ne peut en effet que réjouir les djihadistes. La Turquie, la Russie: deux pays en guerre contre l’Etat islamique qui aujourd’hui se retrouvent à couteaux tirés... Mieux encore, la Turquie est membre de l’OTAN, et de ce fait, l’incident est de nature à mettre à mal les relations entre la Russie et l’alliance atlantique, et ce, à un moment où l’émoi provoqué par les attentats de Paris aurait justement pu conduire à l’union sacrée contre l’Etat Islamique... Le président russe avait d’ailleurs averti: Moscou n’accepterait de coopérer avec la coalition internationale qu’à condition que celle-ci ne lui soit pas hostile.
De l’avis d’Alan Mendoza, de l’institut d’études sociales de Grande-Bretagne, l’EI a tout à gagner de cette tension grandissante entre Ankara et Moscou.
Un seul ennemi: l’Etat islamique
Ces divergences qui se font jour au sein-même de la coalition menée par les Etats-Unis ne peuvent qu’affaiblir celle-ci. Cette coalition regroupe 65 pays, pour l’instant. Mais certains de ces pays semblent avoir d’autres préoccupations, comme par exemple la lutte contre les rebelles Houthi au Yémen. Selon Anthony Cordesman, du centre d’études stratégiques internationales à Washington, parmi les 65 pays de la coalition, 9 peuvent vraiment prétendre faire quelque chose. Les officiels de Washington et du Pentagone s’accordent par ailleurs à reconnaître que les frappes aériennes resteront inefficaces, tant qu’elles ne seront pas appuyées par des pays arabes comme la Jordanie, le Bahrein ou les Emirats Arabes Unis.
Lors d’une conférence de presse tenue le 2 décembre, le responsable du centre de commandement militaire du ministère russe de la défense Sergey Rudskoi a annoncé que les frappes aériennes de l’aviation russe en Syrie avaient permis de priver l’Etat Islamique de la moitié de ses recettes pétrolières. Or, selon ce responsable, les recettes pétrolières de l’Etat Islamique sont estimées à 3 millions de dollars par jour, soit 2 milliards de dollars par an.
Dans un document publié sur les forums jihadistes le 1er décembre, l’Etat Islamique menace d’étendre la guerre jusqu’en Inde, au Pakistan, au Bangladesh, en Afghanistan et dans d’autres pays.
Face à cette situation, les Etats Unis et l’OTAN appellent la Turquie et la Russie à laisser de côté leurs querelles diplomatiques et à se focaliser sur l’enemi commun: l’Etat Islamique. Le secrétaire d’état américain John Kerry a affirmé que Washington saluait la participation de la Russie à n’importe quelle mission visant à mettre un terme au conflit en Syrie et que la Russie pourrait jouer le rôle constructif dans ce pays du Moyen-Orient.
Il est clair que seule une alliance solide incluant les Etats Unis, l’Occident, la Russie et plusieurs pays du Moyen Orient pourra venir à bout de l’Etat Islamique.