L'Espace - Institut français de Hanoi
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VOV : Quelles sont les conséquences de la pandémie sur les activités d’enseignement et d’apprentissage du français dans les instituts français au Vietnam?
Corinne Pignard : L’Institut français du Vietnam n’a pas été épargné par la pandémie et par toutes ses conséquences. Nous avons subi la distanciation sociale. Nous nous suivons la fermeture des écoles, donc nos cours ont été arrêtés en présentiel. L’Institut a été obligé de fermer. Les activités culturelles ont été stoppées. Cependant, on a poursuivi beaucoup de nos activités en ligne puisqu’ici, on est en ligne depuis quasiment le début de la pandémie. On s’est organisé pour faire des cours en ligne et tout le service culturel a aussi pu être sûr, notamment sur les réseaux sociaux.
VOV : Comment vous avez conçu les cours pour adapter à la formation en ligne?
Corinne Pignard : Nous n’avions pas attendu la pandémie pour commencer à faire une transition numérique. Nous avions une toute petite offre vraiment sporadique, mais on avait commencé une transition numérique. Par exemple, l’inscription et le paiement en ligne pour nos apprenants et nos utilisateurs. Alors, ça n’a l’air de rien. Mais finalement, lorsque nous avons dû passer nos cours en ligne, cette partie était prête et donc ça a facilité le passage des cours en présentiel vers le distanciel. Avec l’arrivée de la pandémie. Il a fallu qu’on s’organise afin que nos cours passent en ligne.
Yves Romani : L’Institut français a également passé à une plateforme d’enseignement en ligne, Apolean. Cette plateforme était très utile pour nous et elle a permis déjà, dans un premier temps, de sécuriser la connexion avec nos apprenants. N’importe qui ne peut pas se connecter ou partager ces liens là et ça a permis également aux enseignants de partager sur du long terme des fichiers des dossiers avec les apprenants qui peuvent les retrouver dans leur classe et sur cette plateforme, de créer des modules d’enseignement, des modules complémentaires, donc. Les apprenants maintenant peuvent se connecter sur cette plateforme et faire des exercices en ligne en dehors du temps de classe, donc, en passant justement à Apolean. On a pu donner un meilleur service aussi à nos apprenants.
VOV : Donc Apolean est spécialement conçu pour les cours en ligne?
Yves Romani: Donc, c’est plus performant que Zoom, qui est conçu pour les conférences. Nous utilisons quand même Zoom pour la vidéo. Mais Apolean nous sert vraiment comme plateforme d’enseignement. Elle peut également servir pour des cours en présentiel. Toute la partie des exercices mis en ligne est faisable en dehors du temps de classe et complètement utilisable quand cette plateforme a été mise en service depuis le début de la pandémie.
Corinne Pignard : C’est une plateforme développée par des Français qui a vraiment réfléchi dans l’optique des cours en ligne. C’est pour ça que de nombreux Institut français dans le monde et de nombreuses Alliances françaises utilisent cette plateforme qui est dont l’utilité première est de pouvoir combiner une des cours en ligne et donc en visioconférence. La mise à disposition pour les apprenants de documents et aussi à des espaces de partage, des forums, donc un environnement assez complet et sur lequel nous nous sommes greffés et nous avons créé à chaque fois des classes.
D’un haut niveau, ça a été tout ce travail très important de début de transition des cours qui étaient donnés par nos enseignants en classe, il a fallu tout formaliser pour tout transformer et passer en numérique sur cette plateforme.
VOV : Avez-vous mis beaucoup de temps pour numériser tous ces documents pour organiser des cours en ligne?
Yves Romani: On avait pris à peu près 15 jours au tout début de la pandémie. Lorsqu’on a appris que les écoles fermées, on était un peu pris de court. Il a fallu que le secrétariat pédagogique connaisse la plateforme pour pouvoir en parler aux étudiants. Nous sommes administrateur de la plateforme, donc il a fallu qu’on connaisse un peu les rouages, les enseignants aussi. Et ça a été quinze jours de travail intense où vraiment on n’était pas encore en confinement. Donc on pouvait travailler ensemble. Et là, il y a eu une vraie émulation et un vrai travail de groupe avec les enseignants pour arriver au bout de quinze jours à proposer des cours en ligne.
Corinne Pignard : Donc, ça a été une belle expérience. Finalement, même si c’était un peu tendu un peu, on était un peu inquiet. Oui, avec la pression, mais on a réussi à faire quelque chose. Au début, on a commencé par les cours, ce pour les adultes et à l’heure actuelle, on a pu étendre. On a fait ça de manière progressive et actuellement, tous nos publics, sauf les tout petits de 4-6 ans, on ne les a pas mis en ligne. Mais tous nos publics enfants, adolescents, adultes sont en ligne.
VOV : Pensez-vous à maintenir cette plateforme dans le futur parce que c’est hyper utile et ça permet de réduire le nombre de papiers utilisés?
Corinne Pignard : Oui, c’est vrai qu’il y a une dimension écologique dans l’utilisation de la plateforme. On peut aussi l’utiliser de manière permanente avec des cours en présentiel, puisque les enseignants peuvent déposer des documents, peuvent déposer des liens pour que les étudiants fassent du travail à terme.
Yves Romani : C’est juste un outil très formidable qui nous permettra d’atteindre un plus grand public, même si on n’habite pas au Vietnam.
VOV : Donc, c’est un défi, mais c’est aussi une grande opportunité de développer ce secteur d’enseignement en ligne?
Yves : Tout à fait. Et puis, sur les campus, les difficultés de l’espace.
VOV : Est ce qu’il y avait des départs d’enseignants et des étudiants dans un premier temps avant les cours en ligne?
Corinne Pignard : Alors, comme je disais, nous avons été touchés comme tout le monde par la pandémie. Il est certain que les cours en ligne ne correspondent pas aux souhaits ou aux besoins de tout le monde. Donc, nous avons perdu des étudiants. De nombreux centres en ont perdu, mais nous en avons gardé aussi et nous avons à chaque session. Puisque là, on est en ligne depuis un certain temps, on a quand même toujours à chaque session de nouveaux étudiants qui s’inscrivent pour la première fois à l’Institut français sur des cours en ligne. Donc, nous avons perdu des étudiants, nous en avons gagné. C’est un peu un roulement permanent, mais c’est aussi la nature des instituts en termes de professeurs. Mais ça nous permet aussi d’être créatif. On a repris contact avec d’anciens enseignants qui étaient toujours en France. Et comme nous sommes en ligne, on leur a proposé de travailler pour nous à distance depuis la France. On tient à avoir notre pool de professeurs français parce que c’est notre marque de fabrique. C’est ce qui nous différencie de beaucoup de centres. Evidemment, nous avons tous nos enseignants vietnamiens et qui nous aident beaucoup, qui sont ici et qui nous aident et qui sont des enseignants fabuleux aussi.
VOV : La pandémie, ça vous aide aussi de trouver d’autres enseignants de qualité et de partout dans le monde, pas que n’importe pas qu’en France ?
Corinne Pignard : Oui, voilà, c’est nous et ça nous a obligés à réfléchir et et ça nous oblige à aller de l’avant. De la même façon que les professeurs ont modifié leur façon d’enseigner et ont créé de nouveaux contenus, on réfléchit à des façons différentes de travailler. Nous aussi, on a été obligé d’aller de l’avant, de trouver des solutions. Et de ce point de vue là, c’est positif. C’est positif d’avoir pu avancer.
VOV : Malgré tout, on modernise aussi les choses?
Corinne Pignard : Oui, bien sûr. Nous avons aussi beaucoup travaillé en termes de communication, puisque ça nous a obligés aussi à garder le lien avec notre public. De gros efforts ont été faits en termes de communication. Nous-mêmes, par exemple, nous avons créé des tutoriels parce que mettre des cours en ligne, c’est très bien, mais il faut former les apprenants comment se connecter, comment ça fonctionne. Lorsqu’il s’agit des parents qui inscrivent leurs enfants aider les parents à aider les enfants à suivre les cours en ligne. Donc, il y a aussi eu un accompagnement des équipes, mais aussi du public.
VOV : Ça vous a pris combien de temps pour faire des tutoriels, eux?
Yves Romani : Ça a été assez rapide et c’est pour ça que j’insiste sur le côté Institut français du Vietnam parce que c’était tout le monde à participer. Les premiers tutoriels avaient été faits par notre directeur à Da Nang. Nous avons utilisé aussi les compétences de la personne en communication, qui avait fait une petite vidéo, l’équipe de communication aussi relais en faisant d’autres vidéos, etc.
VOV : Quels sont les impacts sur la vie des enseignants, des enseignants? Est ce que la durée de temps de travail pour préparer les cours a augmenté?
Yves Romani : Alors, évidemment, c’est à dire beaucoup d’enseignants, préparer leurs cours, mais en présentiel, ce qui est déjà très différent. Un premier exemple en présentiel. Vous avez une gestuelle évidemment en ligne. Tout de suite, vous êtes coupé et vous ne voyez pas tout le corps, sauf à vous reculer. Ce que vous n’avez pas besoin de faire déjà dans une classe. Naturellement, on voit l’enseignant dans sa totalité. Et puis, il y a évidemment. L’enseignant voit aussi l’apprenant différemment. La prononciation, tout ça est beaucoup plus facile à corriger en présentiel qu’en ligne.
En effet, pour les professeurs, au début, c’était assez difficile de préparer tous leurs cours pour les faire passer en ligne, mais c’est quelque chose que les professeurs ont réussi à faire.
VOV : L’Institut français a-t-il une stratégie permettant d’améliorer la résilience et adaptabilité des enseignants pour répondre aux futures crises?
Corinne Pignard : Alors, moi, je ne sais pas si on peut parler de stratégie parce que je n’aimerais pas avoir une stratégie pour imaginer la prochaine pandémie. Je n’ai pas envie de me projeter dans un futur sombre, mais ce que je peux dire, c’est qu’on a acquis une réelle expérience. On a créé une nouvelle expérience, on a su s’adapter.
Yves Romani : On a vu que collectivement, on était capable d’apporter des réponses. Donc, je crois que c’est une expérience qu’on a emmagasinée et qui est qu’on pourra remobiliser si on doit faire face à de nouvelles difficultés totalement imprévues. Donc, on a montré qu’on était capable de le faire à l’Institut français du Vietnam et partout ailleurs. Je crois que l’être humain a montré qu’il était capable. On le savait un peu, mais de supporter des choses difficiles. Et donc, s’il y a une stratégie, c’est de se rappeler comment on a été capable de réagir et de remobiliser à nouveau.