(VOVworld) - Gratuits, rapides, interactifs… Les réseaux sociaux sont actuellement la source d'information numéro un. Avec les nouvelles fonctions de diffusion en direct telles que Periscope de Twitter ou Facebook live, les internautes n’attendent plus les nouvelles mais font eux-mêmes circuler des informations quand ils ne rapportent pas directement ce qui se passe sur le terrain. Entrerons-nous bientôt dans un monde où les médias traditionnels cèderont la place aux Twittos ou à Facebook Live? Benoît Patris, rédacteur, journaliste à RTBF, nous donne son avis.
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Crédit photo: @benoitpatris/Twitter |
C’est une menace. C’est vrai que Facebook est peut-être le concurrent principal de la télévision aujourd’hui, mais pour autant, la télévision et le métier de journaliste de télévision ne sont pas morts. Pourquoi? Parce que Facebook diffuse des images, mais qui ne sont pas toujours commentées, qui ne sont pas toujours mises en perspective, qui ne sont pas toujours en relation avec d’autres faits. Le métier de journaliste, c’est de rapporter des faits, mais aussi de les mettre en perspective, de les expliquer, de dire quelles sont les conséquences des images que l’on voit, quelles en sont les causes... Le métier de journaliste a toujours sa place pour peu qu’il trouve les chemins et les voies pour une diffusion sur Facebook, qui met en valeur cette richesse supplémentaire du journalisme, c’est-à-dire sa capacité à expliquer les choses et à les remettre dans leur contexte.
VOV5: Quant à la radio?
Je pense que la radio est l’avenir parce qu’elle trouve avec ces nouveaux moyens de communication des débouchés supplémentaires et nouveaux. Maintenant beaucoup de gens ont un smartphone dans leur poche, et ce smartphone est un outil de diffusion de la radio. Alors la radio, elle trouve des débouchés nouveaux grâce à ces objets connectés en permanence. Mais la radio doit aussi changer un peu. Elle doit ajouter au simple son certains nombres d’éléments, des images parfois, des textes souvent, qui permettent d’enrichir ce qu’on peut dire simplement par le son. Nous travaillons à la RTBF sur les moyens d’enrichir nos contenus radio, donc notre simple voix, nos reportages, nos interviews, de les enrichir par d’autres contenus qu’on appelle les méta-données - des textes, des images - qui permettent d’ajouter quelques choses sans pour autant qu’on oublie qu’on fait d’abord et avant tout de la radio.
VOV5: Les journalistes devront s’adapter à ce changement…
C’est sans doute avant tout une question de polyvalence. Maintenant il est presque indispensable que les journalistes soient un peu plus polyvalents, qu’ils soient capables à la fois de mettre en ligne un article, de commenter en direct un évenement, de faire des versions qui soient adaptées aux réseaux sociaux. Donc, de changer un peu leur manières d’écrire et de travailler. Ça suppose plus de souplesse, plus de polyvalence. Je pense que dans plusieurs écoles, on apprend maintenant comment fonctionnent les réseaux sociaux, et on apprend à pouvoir les utiliser en gardant en tête qu’on fait un métier spécifique qui est le métier de journaliste. Ça veut dire aussi qu’il faut parfois aller plus vite, ce qui est parfois une difficulté, parce qu'aller plus vite, c’est prendre le risque de diffuser une information qui n’est pas vérifiée, qui n’est pas authentique. L’actualité récente nous a démontré que certaines histoires qui ont parcouru le monde entier ont été répercutées par les médias traditionnels mais aussi par les réseaux sociaux et reprises par des journalistes alors qu’elles étaient fausses. C’est ça le danger. Le danger de la rapidité de ces réseaux sociaux qui parfois ne permettent pas de vérifier complètement une information. Je crois que la clef, c’est de continuer à dire qu’une information qui est diffusée, quel que soit le moyen de diffusion, doit être vérifiée. Parfois, cela veut dire qu’on perd un peu de temps, mais il vaut parfois mieux perdre un peu de temps pour donner une information correcte que d’aller très vite et de diffuser une information inexacte.
VOV5: Comment la Radio-Télévision belge de la Communauté française (RTBF) a-t-elle utilisé les réseaux sociaux pour se rapprocher du public?
On les utilise beaucoup, c’est l’interactivité. Je pense que c’est utile parce que ça nourrit des débats, sur un thème, et ça peut le nourrir à l’extérieur, c’est ça ce que je trouve intéressant. D’abord c’est une source d’information. Nous avons à la RTBF une séquence régulière: deux fois par jour, on fait l’actualité. Il y a des choses qui se passent sur le web, sur les réseaux sociaux, des débats, des images qui sont commentés et qui sont parfois révélatrices, qui sont vus par des millions d’internautes et nous y faisons écho. L’autre volet c’est l’interactivité entre les auditeurs et nos rédactions. C’est intéressant pour plusieurs raisons. D’abord, ça nous permet plus rapidement, quand on aborde une problématique, de trouver des personnes qui sont des témoins directs du sujet. C’est une première utilisation. D’autres, c’est l’initiative que nous prenons de mettre en débat une question d’actualité, parce que nous pensons que les premiers témoins qui peuvent parler utilement d’une question d’actualité, c’est ceux qui la vivent. Donc nous faisons appel à ceux qui vivent ces réalités, en leur demandant tous les jours, tous les matins “voilà il y a une question qui est dans l’air, qu’est-ce que vous en pensez? Qu’est-ce que vous avez vécu à propos de cela?” Et puis, on fait écho à tout ça. C’est un travail de tri, un travail journalistique de choisir, de renoncer, de ne pas faire écho à tout ce qu’ils se disent. Donc on essaie de faire une synthèse qui soit la plus honnête possible de l’ensemble des réactions, et on confronte ces avis, ces témoignages avec l’avis d’un spécialiste de la question. Mais l’intérêt, c’est qu’après ça, le débat peut continuer à vivre entre nous et nos auditeurs (les internautes) sur les réseaux sociaux. Dans la mesure du possible, nous tentons de continuer en apportant ce que nous avons amené, en le confrontant aux témoignages et aux avis de ceux qui nous écoutent ou de ceux qui, via les réseaux sociaux et le web ont pu amener, eux, comme points de vue et témoignages.