(VOVWORLD) - Précédé d’une belle réputation, le dernier spectacle de danse hip hop et contemporaine de Kader Attou, The roots, a été présenté au public vietnamien la semaine passée. Chorégraphe français de renommée internationale, directeur du Centre Chorégraphique National de La Rochelle, Kader Attou nous emmène dans un univers à la fois sensuel et onirique, en tirant parti du talent de ses danseurs, ici sublimés.
Photo: Nguyễn Hồng/Vietnam+ |
Il est 20 heures. Le rideau du théâtre de la Jeunesse se lève sur un décor
on ne peut plus minimaliste: un fauteuil bancal, un tourne-disque, des vinyles....
Assis, face au public, un homme exécute des mouvements ondulatoires partant des
bras. Petit à petit, la lumière révèle la présence de 10 autres hommes - il n’y
aura pas de femme! - dans le fond de la scène. Ceux-ci forment une vague, qui
avance pour disparaître à nouveau. Avec The roots, Kader Attou met en scène sa propre
histoire du hip-hop, faite de métissages, de souvenirs d'enfance et d'exigence
technique.
«C’est un spectacle qui a été construit comme un rêve», nous dit-il. «Au début, on voit quelqu’un qui est
assis dans un fauteuil, un peu bancal. Et cette personne va commencer à écouter
un disque. Il va écouter un morceau et ce morceau de musique va lui rappeler
énormément de choses. Et pendant une heure et demie, il y a toute sa mémoire
qui va sortir de sa tête et qui va prendre l’espace dans toutes ses formes.
C’est à la fois poétique et technique. Le spectacle est conçu comme un voyage
auquel on essaie de convier le public».
Photo: VOV
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Comme son titre le suggère, The Roots est une sorte de retour aux sources. Kader Attou
revient en effet au hip-hop de ses débuts, tout en l'enrichissant de mouvements
de flamenco, de kathak, venu du nord de l'Inde, et de danse contemporaine, qu’il explore depuis
20 ans. Poétique, neuf et nostalgique, le hip hop apparaît dans toute sa
richesse dans le spectacle de Kader Attou, qui célèbre l'inventivité d'une
danse passée des rues de New York aux scènes mondiales.
«J’ai eu envie de parler non pas des racines identitaires mais beaucoup
plus des racines artistiques de la danse hip hop»,
explique-t-il. «Ce spectacle est un hommage à la danse hip hop parce que
c’est une danse extraordinaire de par sa virtuosité et son énergie. C’est une
danse qui s’est nourrie d’énormément de choses: de la danse contemporaine, du
cinéma, du théâtre... C’est une danse qui est extrêmement riche. L’idée, c’était
un petit peu d’essayer de creuser et de chercher tout ce que la danse hip hop
peut être : physique, virtuose, poétique, musicale, avec de l’humour... mais c’est aussi pour faire un clin d’œil à cette culture
qui est à la base américaine. C’est pour ça j’ai aussi choisi le terme The roots».
Le choix de «onze danseurs purement hip hop» est un choix artistique que Kader
Attou assume parfaitement.
«Pendant longtemps, on a dit que la danse hip hop était réservée aux
hommes. Aujourd’hui, c’est faux. Il y a beaucoup de danseuses, des chorégraphes
femmes... Mais j’avais surtout envie de montrer l’énergie brute des hommes. La
danse hip hop est très sensuelle. Les 11 danseurs qui sont sur la scène et qui
pendant une heure et demie dansent et vont montrer à la fois un côté virtuose
et un aspect très sensuel. Il y a une part de féminité qui est très palpable.
L’énergie, qu’elle soit masculine ou féminine, est une énergie très douce.
C’est pour ça j’ai eu envie de travailler avec des danseurs hommes», nous explique-t-il.
Né en 1974 à Lyon, à 10 ans, Kader Attou a découvert la danse Hip-Hop par
les medias. Au début, c’était juste une passion. Mais le Hip hop est devenu son
projet de vie plus tard, quand il a compris que cette danse lui permettait
d’imaginer des histoires, d’être sur scène pour s’exprimer à travers le corps
et son énergie.
«Je fais partie d’une génération en France où pendant très longtemps, le
hip hop n’était pas reconnu par le gouvernement, par les institutions», nous confie-t-il. «Mais l’idée, c’était de dire
‘Regardez le hip hop sur scène, on veut vous montrer qu’on peut avoir une
écriture et qu’on peut raconter des choses comme les chorégraphes contemporains
ou classiques’. Et l’idée, ç’a été 30 ans de travail. Et au fur et à mesure,
les théâtres ont commencé à ouvrir leurs portes, parce qu’on proposait des
choses sur scène qui n’étaient pas ce qu’on faisait dans la rue. Sur le
plateau, on essaie d’avoir une vision chorégraphique, avec une écriture. Ce qui
compte, c’est de raconter une histoire et de toucher le public. C’est comme ça qu’on
est arrivé au fur et à mesure à faire le passage de la rue à la scène. Mais… on
est toujours dans la rue».
Kader Attou viens de créer un nouveau spectacle qui s’appelle «Allegria», une
pièce pour huit danseurs. En ce moment, il tourne avec plusieurs spectacles, en
France et à l’étranger, et il touche un public de plus en plus large.