(VOVWORLD) - Partout au Vietnam, on respire des effluves d’encens : à proximité des pagodes, bien évidemment, mais aussi dans les maisons, qui toutes possèdent un autel des ancêtres sur lequel se consument des bâtonnets.
Mais alors, d’où viennent-ils, ces bâtonnets ? Pour ce qui est de la région d’Hanoï, ils viennent en général de la province de Hung Yên, et plus précisément de Cao Thôn, un petit village rattaché à la commune Bao Khê, dont c’est la spécialité artisanale numéro un.
Photo Ngọc Ánh/Toquoc.vn |
Le village de Cao Thôn, qui est également connu sous le nom de Thôn Cao, est situé sur la rive gauche du fleuve Rouge. C’est un village paisible, qui vit donc de ses bâtonnets d’encens. C’est une certaine Dào Thi Khuong, elle-même native du village, qui serait à l’origine de cet artisanat local, ce qui lui vaut d’ailleurs d’être vénérée dans le sanctuaire que lui ont érigé ses descendants, ce qui n’est jamais qu’un prêté pour un rendu, étant donné que l’acte de vénération prend alors la forme de bâtonnets d’encens qui sont brûlés avec toute la ferveur voulue.
Nguyên Nhu Khanh, le vice-président de l’association des artisans de Cao Thôn - Photo Lan Anh/VOV5 |
« D’après les informations qu’on a pu recueillir auprès des personnes les plus âgées, il semble que c’est vers la fin du 18ème siècle qu’on s’est mis à fabriquer des bâtonnets d’encens, nous indique Nguyên Nhu Khanh, le vice-président de l’association des artisans de Cao Thôn. On célèbre en tout cas l’anniversaire du décès de la fondatrice du métier chaque 22ème jour du 8ème mois lunaire. Tous les villageois se rassemblent alors au sanctuaire de la famille des Dào. »
Les bâtonnets d’encens du village Cao Thôn ont un parfum spécial, particulièrement propice à la détente et à la relaxation. Il faut dire que la pâte est fabriquée à base de plantes médicinales … « Toutes les plantes médicinales sont récoltées dans la forêt, précise Nguyên Nhu Khanh. Il y en a 36 en tout, notamment des cardamomes, des réglisses et des fleurs d’aglaia. Il faut les travailler à peu près comme on le fait en médecine traditionnelle. C’est comme ça qu’on obtient ce parfum un peu spécial. »
La « recette » des bâtonnets d’encens est l’un des secrets qui se transmet au sein de chaque famille, génération après génération, comme nous l’explique Nguyên Nhu Khanh.
« Eh oui, on a nos secrets, et on y tient ! Dans la famille, on ne les transmet qu’aux fils et à leurs épouses, jamais aux filles ou à leurs maris, c’est dire !... Et encore, une femme doit avoir au moins 50 ans pour pouvoir être initiée », nous révèle-t-il.
A Cao Thôn, chaque famille a en fait sa propre recette, ce qui explique une certaine diversité dans les produits. Ce qui est sûr en tout cas, c’est que c’est un artisanat qui mobilise à peu près 600 travailleurs et qui se solde par une production annuelle de 10 millions de bâtonnets d’encens. « Les jeunes aussi s’y mettent, et c’est tant mieux parce qu’ils apportent un regard neuf sur la production et qu’ils n’hésitent pas à utiliser des machines, ce qui permet d’accroître le rendement, sans pour autant nuire à la qualité. En tout cas, la clientèle suit, et ça c’est positif », estime Ta Quang Ky, le chef du village.
La clientèle suit, en effet, et mieux encore, elle s’internationalise… Les bâtonnets de Cao Thôn se vendent non seulement au Vietnam mais aussi à l’étranger: en Inde, en Thaïlande, au Cambodge, en Allemagne, en France… Quant aux touristes, ils sont de plus en plus nombreux à s’intéresser à la fabrication des bâtonnets d’encens. « Récemment, on a accueilli un groupe de touristes britanniques, nous raconte Nguyên Nhu Khanh. C’est moi qui leur ai servi de guide, et ils étaient plutôt contents de leur visite. Il faut dire qu’ils ont eu droit au grand jeu : les ateliers, bien sûr, mais aussi la maison communale et la pagode… J’espère que d’autres suivront ! »
Sur les routes du village, des milliers de bâtonnets d’encens sont exposés au soleil, embaumant l’atmosphère…
« L’encens entête et tout le monde en veut », nous dit le proverbe…