Andromake - le langage d'amour

Suite au succès du spectacle « les fables de La Fontaine » creé en 2010, Jean-Marie Lejude, le metteur en scène français, et son équipe sont revenus au Vietnam pour présenter « Andromake », sur un texte de Jon Fossé, écrit d’après l’œuvre de Jean Racine, l’un des 100 chef-d’oeuvre théâtraux les plus connus au monde. Cet « Andromake »-là se déclinait en deux langues, puisque la distribution était mixte, moitié française, moitié vietnamienne. Deux langues, donc, 8 personnage, mais un seul langage, celui, accidenté, de l’amour. C’est un reportage signé Phuong Anh.


L’Opéra de Hanoi, jeudi soir. Sur scène, un échiquier avec deux couleurs tout en contraste, le noir et le blanc, que l’on retrouve dans les autres éléments du décor qui consistent pour l’essentiel en de grands panneaux en tissu synthétique suspendus à la verticale. Le ton est donc donné: le spectacle sera placé sous le signe d’une dualité implacable, dualité des langues et des personnages qui semblent s’affronter dans un dédale de couloirs transversaux et s’abîmer dans ce labyrinthe qu’est le palais du roi Pyrrhus. Un labyrinthe dans lequel on murmure, on sussure, on complote... Mais revenons un instant au décor.  Sur le devant la scène, côté cour, un écran. Côté jardin, un autre écran épousant la forme d’un miroir, sur lequel est projeté l’image d’un couloir et le visage des personnages, comme si ceux-ci étaient vus à travers le prisme d’une immense caméra de surveillance. Question accessoires, il n’y a que deux tabourets qui épousent la forme de pièces de jeu d’échec, de telle sorte qu’on ne sait qui manipule ou qui est manipulé. C’est donc un décor hautement symbolique qui apparaît à nos yeux, oppressant, certes, mais stimulant pour l’imagination.

"Je pense que la mise en scène et le décor sont excellents et très impressionnants."

"La mise en scène m’a bcp impresionnée aussi. J’ai bcp aimé le fait qu’on a mis en écran. C’était bien fait. Je suis très content de venire ici parce que je suis ici par hasard."

C'est ce qu'ont estimé des spectateurs!

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Metteur en scène Jean-Marie Lejude


Pour sa tragégie, Jean Marie Lejude a créé des « couples » de personnages vietnamiens-français : le roi Pyrrus est joué par le comédien vietnamien Nguyen Vinh Xuong alors que le prince de Grèce l’est par l’artiste français Pierre Oliver Mornas. La princesse Hermione et Andromaque, la veuve d’Hector, sont interprétées par 2 comédiennes françaises alors que leurs bonnes sont incarnées par des artistes vietnamiennes. Quant à l’enfant d’Andromaque, c’est le petit Quang Anh, 9 ans, qui assume ce rôle. Jean Marie Lejude nous explique ce choix.

Je me dis que la France et le Vietnam ont eu un moment de partage de culture et c’est intéressant de mettre en scène un classique très célèbre du répertoire français « Andromaque » de Jean Racine, simplement, un classique qui a été reécrit de façon très très moderne par un auteur contemporain Jon Fosse. Et à la suite de quoi, j’ai tenté de réfléchir sur le comment faire que ces deux cultures se rencontrent encore plus à travers un spectacle. Et c’est là que j’ai décidé de faire une distribution mixte. Dans cette pièce, il y a 8 personnages dont 4 personnages sont joués en vietnamien par des acteurs vietnamiens et les 4 autres personnages sont joués par des acteurs français, en français.

La pièce tourne autour de l’histoire d’amour de 4 personnes : Pyrrhus, Andromaque, Hermione et Oreste. Oreste aime Hermione, Hermione aime Pyrrhus, Pyrrhus aime Andromaque. Quant à Andromaque, elle aime son fils Astyanax et son époux mort, Hector. La passion, la trahison, la haine, l’égoisme ont fait de l’amour une tragédie. La tragédie, c’est bien aussi celle de cet enfant, Astyanax, témoin candide et esclave de cette guerre que se livrent les adultes. Et c’est dans une version revisitée que cette  tragédie du 17ème siècle est présentée aux spectateurs vietnamiens. Jean-Marie Lejude

C’est à la fois fidèle et à la fois une adaptation. C’est fidèle sur le fond de l’histoire après par ex : Racine a écrits en vers. Là, il n’y a plus des vers. Et puis, à son époque, Racine a fait scandale les évolutionnaires parce que quand il a crée Andromake, il a détruit un peu l’image romantique du héros. John Fossé a continué cet évolution. Dans l’écriture de Jon Fossé maintenant, un rois, une reine, une princesse, se trouve avoir un même problème, que monsieur et madame tout le monde. Et ça c’est intéressant parce que c’est une façon de faire à nouveau connaître les tragédies antiques à un public jeune contemporain. Ce qui se raconte dans les tragédies anciennes, c’est le problème de tout un chacun maintenant.

Cette modernité se retrouve dans le décor, mais aussi et surtout dans les costumes. C’est aussi une façon de montrer tout ce que cette tragédie a d’actuel, dans notre société.

Les personnages s’habillent les costumes de maintenant, les jupes, les chemises parce que la passion amoureuse, elle existe au 16è siècle, à la période de Grec  et maintenant. Avec les acteurs, nous faison de telle sorte que le langage soit tout à fait comtemporain.

Pendant un mois, les artistes français et vietnamiens ont travaillé avec ardeur pour trouver un terrain d’entente, malgré l’obstacle de la langue. Chacun a sa propre langue et sa propre culture, mais il a bien fallu dépasser cette réalité pour se comprendre et faire comprendre. Les comédiens vietnamiens parlent ainsi vietnamien, avec quelques phrases en français de temps en temps, alors que les comédiens français s’expriment dans la langue de Molière, avec quelques empreints passagers à celle de Nguyen Du. La compréhension globale du spectacle était rendue possible par un sur-titrage en vietnamien, projeté sur écran. C’est Catriona Smith Morrison, qui incarnait Hermione.

Forcément, il y a des difficultés. La première, c’est la langue, la rencontre entre les vietnamiens et les français. Et c’est à ce moment là qu’on se rencontre à telle pointe, ce que dit et ce que joue son partenaire est important parce quand on n’arrive pas à comprendre, on est perdu en tant qu’acteur. Donc, dans tout son travail, pour apprendre son texte, pour essayer de reconnaître les mots, pour reconnaître son jeux et son sentiment pour jouer avec lui, malgré tous ces contraintes là.

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Les artistes en vedette


Pour les comédiens vietnamiens, cette coopération a été l’occasion de travailler avec des professionels français et d’en tirer nombre d’enseignements. C’est aussi un signe qui montre que le théâtre vietnamien est de plus en plus intégré au théâtre mondial. Huynh Vinh Xuong, comédien du tréâtre national du Vietnam, qui jouait le rôle du roi Pyrrhus

Le plus intéressant, c’est que nous avons vraiment pu partager. Pour nous, artistes vietnamiens, c’était l’occasion d’aborder un répertoire auquel nous ne sommes pas habitués. Nous avons appris beaucoup de chose des artistes français. Après un mois de travail, nous sommes devenus des amis. Le théâtre, ça crée des liens ! C’est une expérience qui m’aura été utile dans ma vie comme dans ma carrière !

Un mois de travail, donc, et au final, un spectacle abouti. 2 langues, cettes, mais un seul langage. Les « couples » franco-vietnamiens fonctionnent à merveille et c’est là le succès incontestable de la pièce et de Jean Mari Lejude.

Comme dans toute tragédie classique qui se respecte, la pièce se clôture avec la mort de plusieurs des personnages principaux. Seul Andromaque, détenue en terre ennemie avec son fils, restera intègre grâce au dévouement inébranlable et sacrificiel qu’elle lui porte.

A noter enfin, qu’« Andromake » sera présenté en France, en 2013 !

Phuong Anh

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