Le Théâtre Công Nhân vient de célébrer les noces de la musique classique et de la musique traditionelle, avec le retour sur scène du duo Pho An My et Dang Tue Nguyen, respectivement pianiste et compositeur.
Suite aux succès en 2011 de Bong - "ombre" en français - et en 2014 de Lua - "feu" en français, le duo s'attaque cette fois à Gio - "vent"...
C'est une distribution de haut vol dont s'était entouré Dang Tue Nguyen, en ce soir du 29 octobre: le flûtiste Huu Trung, la chanteuse de cheo Thanh Hoai et donc la pianiste Pho An My... Et tout ce beau monde placé sous la direction de Pho Duc Phuong, compositeur, et de Vu Dinh Quan, ancien directeur du Théâtre national de cheo... Un mélange des genres, a priori, mais qui fonctionne merveilleusement bien, avec pour fil rouge la destinée injuste de Quan Am Thi Kinh.
Quan Am Thi Kinh, c'est l'une des pièces maîtresses du cheo, qui nous relate les avanies d'une femme persécutée, qui n'arrivera même pas à trouver la paix dans le refuge d'un temple bouddhiste... Une destinée tragique qui a interpellé Pho An My :
«Pour ce spectacle, j'ai voulu exploiter l'aspect romantique et tourmenté de certaines pièces de mon répertoire pour servir de fond sonore à l'histoire de cette femme qui est l'archétype-même de la femme vietnamienne déconsidérée et humiliée par une société impitoyable. A mon avis, il y a deux femmes en Quan Am Thi Kinh, l'impétueuse et la fragile. C'est pour ça aussi que je suis avec Thanh Hoai sur scène...»
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Quand le piano et le cheo étaient mis en scène avec le même rythme |
Gio est le dernier spectacle hybride du duo Pho An My et Dang Tue Nguyen, les deux artistes comptant ensuite revenir à des choses plus classiques. En 2011, ils avaient déjà exploré l'univers du chau van, le chant des médium, en 2014, celui du tuong... Gio fonctionne globalement sur le même principe, mais avec tout de même quelques spécificités bien affirmées.
«Les deux premiers spectacles étaient assez longs: près de deux heures. Gio, par contre, ne dure qu'une heure, et c'est divisé en cinq tableaux: Crépuscule - Injustice - Souhait - Berceuse et enfin Nirvana ou Feu.»
Pho An My a rencontré Dang Tue Nguyen il y a dix ans. C'est de cette rencontre qu'est née cette trilogie, sur la base d'un mariage du piano - instrument romantique par excellence - et de la musique traditionnelle. Dang Tue Nguyen:
«Pho An My est très, très délicate et elle a une sensibilité vraiment à part: elle est capable de capter tous les courants musicaux... Bien sûr, il arrive qu'on ait des divergences de points de vue, mais il y a une compréhension mutuelle qui reste plus forte que tout. Tout est affaire de persuasion, au fond...»
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Le duo dans une répétition avant "Gio" |
10 ans de coopération, donc, et une vingtaine d’année d’études, mais toujours un esprit d'aventure, une envie de se livrer à des expériences inédites. Pho An My:
«Ne jamais tomber dans la routine! Ça, c'est absolument essentiel! Si on n'est pas tout le temps "sur la brèche", on ne peut rien faire de bien en matière d'art. Avec Gio, il y a une excitation particulière: je suis à la fois musicienne et responsable du projet dans sa globalité. En tout cas, je suis contente de voir que ça marche bien, que les billets se vendent bien. Ce n'était pas évident parce que c'est un créneau vraiment nouveau. Mais je compte bien continuer sur cette voie, en "internationalisant" la musique vietnamienne.»
A noter, pour conclure, que Gió sera présenté le 3 décembre à GEM Center, au 8, rue Nguyên Binh Khiêm, à Hô Chi Minh-ville.