(VOVworld) C’est devenu une habitude. Tous les dimanches matins vers 9 heures, même s’il pleut, la rue Triệu Việt Vương abrite un petit marché, situé devant le numéro 160. Mais attention! Ce n’est pas un marché comme les autres! C’est un marché aux timbres qui attire tous les philatélistes de la ville.
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Le marché aux timbres de Hanoi, 160 rue Triệu Việt Vương |
Le marché aux timbres - ou marché philatélique, comme on voudra - se trouve en fait devant le domicile d’un certain Phạm Hào, philatéliste renommé de Hanoi. Tous les “timbrés du timbre” - s’y retrouvent pour échanger… des timbres, évidemment, mais aussi de ces filons qu’on ne se transmet qu’entre initiés. Au fil du temps, les philatélistes de Hanoi y ont été rejoints par d’autres, venus de province ou même de l’étranger, toutes générations confondues. Pas très bruyant, par contre, pour un marché! Ca ressemblerait plutôt à un conciliabule feutré entre connaisseurs autour de quelques tasses de thé et des inévitables albums de timbres qu’on s’échange avec un mélange de curiosité et de componction avant d’y aller de son petit commentaire, d’un air entendu. D’après Đào Đức Long, philatéliste lui aussi, les timbres suscitent très vite une passion qui vire doucement à l’addiction : “Pour être philatéliste, il faut avoir un certain niveau de culture en histoire, en géographie, en sciences naturelles… Un timbre, c’est une histoire, et il faut la connaître cette histoire! C’est pour ça que la philatélie est aussi fascinante!”
Pour Hoàng Anh Tuấn, étudiant à Hanoi, la philatélie est un loisir qui demande beaucoup de labeur mais qui permet d’enrichir considérablement son champ culturel, ce en quoi il rejoint Đào Đức Long : “Collectionner des timbres demande tout d’abord de la persévérance. Mais ça permet de redécouvrir ce qu’a été la vie sociale ou économique de tel ou tel pays à une époque donnée.”
Les thèmes picturaux des timbres sont bien sûr très variés, mais au Vietnam, en tout cas, on retrouve surtout des paysages, des plantes ou des animaux, des personnages historiques, l’oncle Ho… Au marché, chacun apporte ses petites trouvailles, pour le seul plaisir de les partager. Mais naturellement, au royaume de la trouvaille, la rareté est reine! Quoi de plus excitant, pour un philatéliste chevronné, que de mettre la main sur une pièce ancienne, réputée introuvable à moins d’un coup de chance à rendre jaloux tous ses confrères? Au Vietnam, la collection de timbre la plus chère est sans doute celle qui a été réalisée à l’effigie de Mạc Thị Bưởi en novembre 1956 : de 550 à 600 dollars! Quant à la collection présentant le plus de fautes d’impression - ô suprême délice du philatéliste! -, c’est celle qui a été éditée à l’occasion du 700ème anniversaire de Chu Văn An, dans laquelle l’illustre lettré, qui n’en avait certainement pas demandé tant - est nanti d’une magnifique paire de lunettes! Superbe anachronisme qui n’en finit pas de faire la joie des collectionneurs!
Mais pour en revenir au marché, les philatélistes aiment venir y partager la joie qu’ils éprouvent à acquérir un joli timbre. C’est d’ailleurs ce qui a poussé Phạm Hào à créer ce marché devant la porte de sa maison : “Les philatélistes viennent ici pour acquérir des timbres ou simplement pour en admirer. Il s’agit ni plus ni moins d’assouvir une passion!”
Une “passion”, le mot est lancé, et il sonne juste! Il nous reste à souhaiter, à l’instar de Phạm Hào et de tous ses amis philatélistes, que cette passion soit de plus en plus contagieuse, car à travers les timbres, c’est tout un pan de l’histoire d’un pays ou d’une société qui se dessine. D’aucun appellent cela “patrimoine”.
Tô Tuấn