(VOVworld) - Débris d’avion, sacs de sable, douilles d’obus... des objets de la guerre recyclés en objets d’usage courant, en jouets d’enfants... c’est ce que vous trouverez à l’Institut Français de Hanoï, qui réserve actuellement son hall à une exposition intitulée « Né en 1983/ Kham Thien ».
|
« Né en 1983/ Kham Thien », c’est donc le nom de cette exposition qui dure jusqu’au 28 septembre, mais c’est aussi le CV raccourci de son auteur, Bang Nhat Linh, qui est né en 1983 rue Kham Thien, à Hanoï, cette même rue qui avait été dévastée en 1972 par les raids meurtriers menés par l’aviation américaine. Bang Nhat Linh : « Je suis né rue Kham Thien, bien après la guerre. Enfant, je jouais souvent dans des cratères de bombe qui étaient devenus de petits étangs. Mes proches m’ont raconté l’histoire de cette rue que je voulais restituer dans le cadre de cette exposition, sous un autre regard, celui d’une personne née après la guerre. Ce qui prime ici, ce ne sont plus les souffrances et les pertes de la guerre, mais l’optimisme et la volonté de surmonter toutes les difficultés. »
En 7 ans, Nhat Linh a parcouru le pays pour collectionner une bonne cinquantaine d’objets. Ceux qui lui tiennent le plus à coeur sont la chaise du pilote, le nez et les débris d’ailes d’un chasseur MiG-21, ce principal avion des forces de l’air vietnamiennes lors des dernières années de la résistance anti-américaine. Une partie de ces objets de guerre figure dans l’exposition « Né en 1983/Kham Thien ». Ce sont des vases à fleurs, des verres, des thermos confectionnés à partir d’obus, d’armes à feu, de débris d’avion ou de canon. Sur ces objets, on trouve des gravures indiquant l’année de la fabrication ou des motifs de décoration.
Non content d’exposer des objets fabriqués par les autres, Nhat Linh présente aussi des jouets qu’il a confectionnés lui-même à partir d’une carcasse d’avion : une balançoire, une chaise pour jouer aux balles, entre autres. Selon lui, l’adulte, c’est l’enfant en plus grand format. Quand les adultes se disputent quelque chose, la guerre éclate : « Quand on aime un objet, il y a un lien qui s’établit entre nous et lui. Quand un de nos proches va quelque part et tombe sur un objet qu’il sait qu’on aime bien, il va nous l’acheter. Entre amis, on se partage aussi nos objets. En ce qui concerne les objets exposés ici, je les adore puisque ce sont des objets fabriqués pour tuer qui ont été transformés en jouets d’enfants. »
|
Dans cette installation, Nhat Linh projette un reportage qu’il a lui-même réalisé sur un ancien combattant Bru dans la province centrale de Quang Tri. Celui-ci a transformé des cratères de bombe en étangs piscicoles. Pour Nhat Linh, raconter l’histoire de cet ancien combattant, c’est une façon d’aider ceux qui n’ont pas connu la guerre à mieux comprendre leurs prédécesseurs. Il dit : « Je souhaite que les jeunes viennent voir ces objets du passé pour comprendre comment leurs prédécesseurs ont vécu, comment ils ont fait pour surmonter de telles difficultés. Chacun peut avoir sa propre vision de l’histoire. Pour ma part, j’ai voulu transformer des objets de guerre en objets d’usage courant et en jouets pour adoucir les pensées sur la guerre et pour inviter tout un chacun à faire quelque chose pour bâtir un meilleur avenir. »
Diplômé de l’école des beaux arts de Hanoï, Bang Nhat Linh a présenté plusieurs installations individuelles remarquées. Il ambitionne de réaliser un grand projet consacré aux oeuvres nées d’armes et de munitions de guerre. « Né en 1983/Kham Thien » n’est que la première exposition d’un projet mené par une personne née après la guerre qui désire se plonger dans la mémoire de l’histoire nationale, confie-t-il./.