Culte des déesses-mères: du folklore au patrimoine mondial

(VOVworld) - D’une croyance populaire ancienne, les pratiques liées au culte des déesses-mères des Trois mondes au Vietnam font aujourd’hui partie intégrante du patrimoine culturel de l’humanité. D’une existence hasardeuse au milieu du folklore national au développement volontaire et sélectif d’un patrimoine mondial, que faire pour les préserver ? Des spécialistes tentent de trouver la réponse.

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La vitalité de cette croyance n’est plus à prouver, affirme le professeur Ngo Duc Thinh, ancien directeur de l’Institut d’études culturelles vietnamiennes. Depuis un millier d’années, elle répond aux principaux besoins quotidiens des habitants qui aspirent tous à la joie, au bonheur et à la chance, explique-t-il.

«Cette façon d’entrer en transe est propre aux Vietnamiens. La cérémonie de possession d’esprits du culte des déesses-mères des Trois mondes est comme un musée vivant de la culture traditionnelle nationale. Cette croyance honore la femme, synonyme de beauté, et tout ce qui constitue ces pratiques est beau, brillant et fantasmagorique, que ce soient les costumes, les danses ou la musique. Je dirais même qu’il s’agit là du summum religieux, culturel et artistique du Vietnam. »

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Ce qui est certain, c’est que ces pratiques ont connu bien des hauts et des bas. Pendant longtemps, elles n'ont pas été considérées comme une religion populaire. Il a fallu attendre jusqu’à 1986 pour qu’elles soient, enfin, officialisées en tant que composante de la culture locale, fait savoir Nguyen Thi Ngoc Mai, une responsable de l’Institut d’études religieuses :

« Depuis 1986, avec le Renouveau national et surtout après l’entrée en vigueur de la loi sur le patrimoine culturel, le culte des déesses-mères des Trois mondes a pu renaître de ses cendres. Il est donc revenu au goût du jour, mais il faut dire aussi qu’il correspond à ce que le commun des mortels recherche plus que jamais dans une économie de marché, à savoir la prospérité, la chance, la promotion… »

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Les spécialistes de ce culte ancien ont contribué, pour une part considérable, à sa reconnaissance internationale. Ils ont mené des recherches approfondies et en ont publié les résultats, ce qui a fait changer la mentalité des gestionnaires publics et de la population vis-à-vis des pratiques spirituelles. Mais, pour préserver le culte des déesses-mères à proprement parler, l’élément décisif réside dans les chamans eux-mêmes. C’est pour des raisons personnelles qu’ils sont devenus religieux, et ce sont eux qui décident de la survie de ces pratiques, estime le professeur Ngo Duc Thinh.

« Le culte des déesses-mères des Trois mondes est désormais vu d’un œil plus objectif par les gestionnaires et par la communauté qui ne le considèrent plus comme une superstition à bannir. C’est le résultat de plusieurs dizaines d’années d’efforts. Je crois qu’il s’agit d’une grande évolution de la conscience sociale que d’honorer ce culte. »

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La grande difficulté dans la préservation de cette croyance populaire réside dans l’absence d’organisation systémique. Selon Nguyen Ngoc Mai, de l’Institut d’études religieuses, l’Etat doit prendre des mesures adaptées à l’évolution naturelle de ces pratiques religieuses pour favoriser son développement :

« A mon avis, il importe de publier plus largement les études sur les cérémonies rituelles pour que la population les comprenne vraiment et se rende compte de leurs valeurs authentiques. Maintenant que l’UNESCO les a inscrites au patrimoine culturel mondial, je crois que les chamans seront plus conscients de leur mission historique et culturelle. »

A la différence d’autres religions, le culte des déesses-mères des Trois régions des Vietnamiens ne promet pas aux pratiquants un paradis post-mortem, mais une vie meilleure ici et maintenant. Une originalité vietnamienne qui, grâce aux efforts de beaucoup de personnes, est enfin venue s’ajouter aux valeurs universelles.

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