(VOVWORLD) - Face aux défis du changement climatique et de la sécurité alimentaire, la transition vers une agriculture plus durable est devenue une priorité pour le Vietnam. Dans cette démarche, la coopération avec la France joue un rôle clé. Recherche scientifique, transfert de savoir-faire, financements ciblés… Les deux pays unissent leurs efforts pour promouvoir une agriculture écologique, plus respectueuse de l’environnement et mieux adaptée aux défis actuels.
Un modèle d’élevage de crevettes écologique à Cà Mau. Photo d'illustration: caf.ctu.edu.vn |
En l’espace d’une quarantaine d’années, le Vietnam a réalisé des avancées remarquables en matière de production agricole. Non content d’être parvenu à assurer son autosuffisance alimentaire, il s’est hissé parmi les plus grands exportateurs mondiaux. Ces progrès sont le fruit d’efforts considérables. Cependant, le changement climatique et les limites du modèle de développement actuel imposent une transformation profonde du secteur agricole, un défi que le Vietnam partage avec de nombreux autres pays, dont la France, comme nous le fait remarquer Olivier Brochet, l’ambassadeur de France au Vietnam.
«La perte de la biodiversité est l’un des dangers les plus importants qui nous menacent aujourd’hui. Il faut réagir, adapter, changer les modes de production de l’agriculture. Le Vietnam a pris la décision de s’attaquer à ces problèmes. La France est naturellement à ses côtés pour l’accompagner. Nous apportons notre expertise scientifique et technologique pour soutenir ces efforts. Je dois juste citer un exemple pour montrer que ce ne sont pas obligatoirement les questions de haute technologie, ni de grandes quantités de financements, mais que ce sont surtout des questions d’examen des pratiques et d’accompagnement dans le changement des pratiques. J’étais il y a quelques semaines à Cà Mau pour voir un projet mené par le CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) pour faire changer le mode de production en aquaculture pour les crevettes. Le nouveau dispositif qui a été travaillé pendant quatre ans est maintenant repris par une quinzaine de producteurs pour un coût tout à fait raisonnable de transformation et qui permet d’un seul coup d’améliorer de 90% l'impact écologique de la production de crevettes et avec en plus une augmentation de la production. Donc, c’est tout bénéfice mais ça suppose un gros effort de formation, de transmission de nouvelles pratiques», nous dit-il.
Olivier Brochet, l’ambassadeur de France au Vietnam. Photo: Phuong Anh/VOV5 |
Face à l’urgence climatique, l’agriculture écologique apparaît comme une solution incontournable. En limitant l’usage des intrants chimiques (engrais et pesticides) dont la fabrication est extrêmement énergivore, elle réduit considérablement les émissions de gaz à effet de serre. En parallèle, une gestion plus efficace de l’eau et une production en phase avec la saisonnalité permettent de limiter les émissions de méthane, qui est un puissant gaz à effet de serre. Cependant, comme le rappelle l’ambassadeur de France, l’agriculture biologique à elle seule ne peut résoudre l’ensemble des problématiques.
«D’abord, il est essentiel de réduire notre consommation de produits carnés, notamment parce que la fabrication de viande est excessivement coûteuse en énergie, en eau, et qu’elle produis des gaz à effet de serre en très grande quantité. Et puis, il y a un effort à faire aussi sur les questions logistiques. Il faut réduire les longueurs, les distances de transport. Cela permet aussi de diminuer les gaz à effet de serre. Et il faut réduire le gâchis alimentaire, puisque plus d’un tiers de la production agricole mondiale est perdue, parce qu'elle n'est pas bien transportée. Les questions logistiques, les questions de conservation ne sont pas suffisamment bien traitées. Donc, il y a un énorme chantier autour de l’agriculture qui peut permettre d’améliorer très nettement les effets pour la planète, et en même temps d’avoir une meilleure nourriture pour tout le monde», explique-t-il.
Photo d'illustration: nongnghiephuuco.vn |
Au-delà des zones rurales, la préservation de l’agriculture urbaine constitue un autre enjeu majeur, notamment dans les grandes métropoles comme Hanoï.
«À Hanoï, comme dans toutes les grandes villes du monde, on fait venir la nourriture de plus en plus loin. Il est important que dans le développement des grandes zones urbaines comme à Hanoï, on puisse intégrer une réflexion sur la préservation des espaces agricoles au plus près de la ville, pour les mettre en valeur, ce qui permet également aux citadins d’avoir des espaces d’aération agréables, pas trop loin. Ce défi est d’autant plus complexe qu’il se heurte souvent à des contraintes administratives. Par exemple, en région parisienne, la gestion de l’espace est particulièrement difficile en raison de la fragmentation des collectivités : Paris est une ville relativement petite entourée de nombreuses autres municipalités et départements. À l’inverse, Hanoï bénéficie d’une unité administrative plus vaste, ce qui représente un atout pour la préservation des espaces agricoles. A Hanoï, j’ai eu l’occasion de découvrir l’espace situé sur les berges du fleuve Rouge, au pied du pont Long Biên. J’ai notamment visité les magnifiques jardins d’horticulture et de fleurs créés par une association de femmes. Je trouve cette initiative remarquable, non seulement parce qu’elle embellit le quartier, mais aussi parce qu’elle illustre parfaitement le potentiel de l’agriculture urbaine. Ce projet est un excellent exemple d’initiative locale qui, si elle est soutenue et développée, pourrait donner des résultats très prometteurs», fait valoir Olivier Brochet.
La transition vers une agriculture durable ne repose pas uniquement sur les avancées technologiques ou les financements, mais aussi sur un changement profond de pratiques et de mentalités. Conscient de ces enjeux, le Vietnam s’engage activement dans cette voie à travers des initiatives ambitieuses. Avec l’appui de partenaires internationaux comme la France, le pays pourrait devenir un modèle d’agriculture plus respectueuse de l’environnement, bénéfique à la fois pour ses habitants et pour la planète.