(VOVworld) - Dans le delta du fleuve Rouge, les villages sont le plus souvent constitués autour d’une lignée familiale ou d’une activité artisanale (l’un n’excluant pas l’autre), qui en est le pivot. Communautaire, la vie que mènent les populations rurales l’est à plus d’un titre, et il n’est que de constater l’importance que prennent les ouvrages collectifs pour s’en convaincre.
Le delta du fleuve Rouge passe pour être le berceau de la culture et de la civilisation vietnamiennes. Les paysans qui le peuplent vivent essentiellement de la riziculture inondée, dans une parfaite harmonie avec la nature qui les entoure, dont ils ont su tirer le meilleur. Sur le plan spirituel, leur mode de vie est influencé aussi bien par les préceptes du Bouddhisme que par ceux du Confucianisme, d’où un sens aigu de la hiérarchie familiale.
Quant aux villages du delta, ils sont de véritables images d’estampes et symbolisent à eux seuls un art de vivre presque intemporel à force de sagesse.
Et s’il est un élément qui illustre à merveille cette intemporalité, c’est bien le banian séculaire que chaque village deltaïque digne de ce nom se targue de posséder. Venu du fond des âges, il étend son ombre protectrice et bienveillante à l’ensemble de la communauté.
Nombreux sont les villages qui possèdent également un pont : couvert, en pierre ou en brique, celui-ci contribue au charme bucolique des lieux…
Mais si l’on parle d’ouvrage architectural, on ne saurait omettre la porte monumentale qui marque l’entrée du village. Même si cette dernière a déjà eu les honneurs de nos éditions précédentes, on ne dira jamais assez à quel point elle fait la fierté de toute la communauté, pour laquelle elle est beaucoup plus qu’une simple délimitation, comme nous l’explique Trân Huu Son, docteur ès lettres et membre de l’association des arts folkloriques du Vietnam.
« Très rapidement, cette porte d’entrée est passée d’une fonction de délimitation à une fonction d’étalage de puissance et de prospérité. Le principe est au fond simple : plus un village s’enrichit, plus sa porte d’entrée devient imposante…"
Alors, faisons le point. Nous avons déjà évoqué le banian, la porte d’entrée… Restent la maison communale et la pagode. Pour ce qui est de la maison communale, puisque l’heure est aux festivités printanières et que ces fameux édifices en sont bien souvent le théâtre, nous insisterons sur leur fonction éminemment sociale. Quant à la pagode, elle témoigne bien évidemment de l’emprise du Bouddhisme sur la population. Le bonze supérieur Thich Tiên Dat, gérant de la pagode de Cu Dà, en banlieue de Hanoï :
« Le bouddhisme a été introduit au Vietnam il y a très longtemps. Là où il y a des villages, il y a des pagodes. C’est vrai en tout cas pour le delta du fleuve Rouge, mais pas seulement. Les pagodes, ce sont des lieux où l’on vient pour se recueillir, où l’on confie ses espoirs au Bouddha miséricordieux. »
Il existe encore bien d’autres ouvrages à dimension spirituelle dans les villages du delta, notamment des temples et des pagodons, les premiers étant consacrés au culte des déesses-mères, des génies, des personnes méritantes ; les seconds aux génies protecteurs. Le puits, qui se trouve à côté d’un sanctuaire, occupe aussi une place importante dans la vie spirituelle des villageois qui vont y prendre de l’eau lors de diverses cérémonies de culte.
En ce qui concerne les habitations, on note la présence de haies d’hibiscus, d’aréquiers et de bananiers, respectivement autour, devant et derrière. En moyenne, une maison comprend trois travées principales et deux compartiments supplémentaires. Les plus aisées comportent cinq ou sept travées.
Chaque village est en principe jouxté d’un cimetière. Mais la géomancie étant souveraine dans nos campagnes, il n’est pas rare de voir des tombeaux disséminés dans les rizières.
Dire de ces villages du delta qu’ils sont profondément ancrés dans les mémoires de ceux qui les habitent relève d’un doux euphémisme. A vrai dire, ces villages sont en eux-mêmes la mémoire du delta…
A force de sagesse…