(VOVworld) Dans la pensée vietnamienne, le dragon est un animal certes mythique, mais néanmoins très présent dans la vie sociale. Traditionnellement, il est considéré comme le plus brillant des 12 animaux de l’horoscope. Symbole d’honneur, de pouvoir et d’intelligence, il est censé apporter chance. Autant dire que cette nouvelle année qui arrive - l’année du Dragon est placée sous les meilleurs augures. Beaucoup de Vietnamiens souhaitent d’ailleurs donner naissance à un « petit dragon », forcément vigoureux et paré de tous les attributs de la réussite.
|
Au Vietnam, le dragon occupe une position particulière dans la culture et les croyances. Il a longtemps symbolisé le pouvoir absolu du monarque, à tel point que certains objets appartenant au souverain étaient désignés par le mot « dragon » : on avait ainsi le « lit-dragon », le lit du roi, autrement dit, le « manteau-dragon », le manteau du roi, le « char-dragon », le char du roi, et ainsi de suite… Le dragon figure également en tête des 4 animaux sacrés: le dragon, donc, la licorne, la tortue et le phénix. Et il reste profondément ancré dans la mémoire collective des Vietnamiens en tant que précurseur de la nation. Tout Vietnamien digne de ce nom connaît en effet la légende de Lac Long Quan, qui était lui-même un dragon, et qui a épousé une fée, Au Co, pour donner naissance aux cent premier Viets. On retrouve déjà le dragon à l’ère de Đông Sơn, sous des formes décoratives. Il apparaît également dans des rituels de vénération des quatre génies - les nuages, la pluie, le tonnerre et la foudre - et dans des prières destinées à s’attirer de bonnes récoltes. Au fil du temps, le dragon s’est affirmé comme le symbole de la prospérité, de la puissance de la nation et du pouvoir féodal. Mais c’est sous la dynastie des Ly, il y a 1000 ans, qu’il semble atteindre son apogée. Dans son édit de transfert de la capitale de Hoa Lu à Dai La, l’actuelle Hanoi, le roi Ly Thai To mentionne un songe qu’il aurait fait et dans lequel lui serait apparue l’image d’un dragon prenant son envol au-dessus de Dai La, d’où le nom qu’allait prendre la ville : Thang Long - le dragon prenant son envol, donc. A travers les différentes dynasties qui se sont succédées ensuite, le dragon est toujours représenté enveloppé par des nuées ou des vagues furieuses.
En 2010, à l’occasion du millénaire de la capitale, des cinéastes ont offerts au public un petit film 3D intitulé « Le dragon vietnamien ». Tout un programme ! Le film en question ne dure que 3 minutes, juste le temps d’affirmer haut et fort que le Vietnam épouse la forme d’un dragon, et non d’un trop prosaïque S, comme on l’entend trop souvent dire ! Le professeur Trân Van Khê, musicologue vietnamien qu’on ne présente plus, a vu le film : J’ai vu ce film sur le dragon. J’ai trouvé ça très émouvant. On voit un dragon qui vole puis qui se pose à terre pour former le Vietnam, sa tête figurant alors le Nord, et sa queue, la pointe de Ca Mau, à l’extrême-Sud. Le delta du Mékong comporte d’ailleurs neuf ramifications qu’on appelle « cuu long », c’est à dire « les neuf dragons », c’est dire à quel point le dragon est étroitement lié à la nation. Et puis, nous autres Vietnamiens, nous nous considérons toujours comme les descendants d’un dragon et d’une fée.
Dans le folklore, le dragon est très présent. On le retrouve bien évidemment dans la danse qui porte son nom, mais aussi dans des courses de pirogues dont il est la tête de proue ou dans de nombreux jeux populaires. Quant aux temples, aux pagodes et aux palais, le dragon y règne en maître incontesté, sa tête levée bien haut, crinière au vent, et une perle dans la gueule. Parfois, dans certaines représentations, son corps est ondulé en douze méandres, comme autant de mois de l’année. Quoiqu’il en soit, qu’il ait une valeur purement symbolique ou non, il est proche de tous.
Honneur, pouvoir, intelligence… On est en droit d’attendre le meilleur de cette année du Dragon qui débute et qui, soyons-en certains, nous apportera à tous beaucoup de bonheur et de réussite.
Tô Tuấn