Le régime matriarcal des Ede

(VOVworld)- La société Ede est une société profondément matrilinéaire. Cela se traduit tant dans les relations familiales ou sociales que dans l’architecture et la musique. Aujourd’hui, nous allons nous intéresser de près à la vie familiale de cette ethnie.

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Photo: Wikipedia

Depuis la nuit des temps, dans la famille Ede, c’est la femme qui détient le pouvoir suprême. C’est d’aileurs son nom que portent les enfants. Nguyễn Duy Thiệu, directeur adjoint du musée d’ethnographie du Vietnam: «Les femmes Ede ont le pouvoir de décision même dans le choix de leur époux. Lorsqu’une fille Ede tombe amoureuse, elle n’a qu’à dire à ses parents qu’elle veut épouser tel ou tel garçon. Et son voeu sera exaucé. L’heureux élu viendra ensuite vivre chez sa femme, et ses enfants prendront le nom de cette dernière. Si par malheur, son épouse décède, la famille de celle-ci lui choisira une autre femme.»

Cette tradition, appelée chuê nuê par les Ede, a cependant quelque chose d’assez injuste vis-à-vis du pauvre veuf qui voit donc se priver de son droit de choisir la femme de son coeur. Cela dit, même si la femme dirige la famille, l’homme a aussi son rôle à jouer.  Nguyen Duy Thieu:  «C’est vrai que la femme décide mais il lui arrive aussi de décider grâce à son homme. C’est le cas de Dam San dans l’épopée éponyme. C’est lui le vrai chef de tribu, mais c’est sa femme qui exprime ce pouvoir à l’extérieur, puisque c’est elle la cheffe officielle. Mais lorsqu’il s’agit de diriger la guerre, c’est lui et pas elle, elle ne dirige qu’à l’arrière.»

Quand on rend visite à une famille Ede, la personne qui reçoit au nom de la famille est un homme, soit le fils soit le mari de la maîtresse du foyer. L’homme Ede représente la famille et toute la lignée familiale de sa mère dans les relations avec l’extérieur. C’est lui qui gère les grands événements survenus dans la lignée familiale de sa mère comme les mariages ou les funérailles.

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Photo: Wikipedia

Le matriarcat des Ede se traduit également dans l’architecture de la maison longue traditionnelle. Cette maison sur pilotis construite en bois ou en bambou est suffisamment large pour abriter une grande famille de plusieurs dizaines de membres. H’rôl, une habitante de Buon Ma Thuot, nous détaille la composition d’une maison longue typique des Ede: «La maison longue comprend 2 parties: la première est le salon dans lequel il y un espace réservé aux garçons et aux hommes qui ne sont pas encore mariés; la deuxième partie est réservée aux couples, mais dans cette partie, il y a aussi un espace réservé aux filles qui ne sont pas encore mariées et aux femmes invitées. Les invités masculins, eux, peuvent passer la nuit près de l’escalier.»

L’escalier qui conduit à l’entrée principale est sculpté de seins féminins et de croissant de lune, qui sont les symboles de la féminité. En fait, il y a 2 escaliers, l’un femelle et l’autre mâle. L’escalier femelle est situé devant la maison, destiné aux hôtes et aux membres masculins de la famille. L’escalier masculin, lui, est situé à l’arrière, destiné aux femmes.

La femme Ede n’est pas seulement maîtresse du foyer, elle est aussi maîtresse du village. En langue Ede, on les appelle «pô lan». La pô lan représente tout le village dans la gestion des terres, dans le règlement des litiges internes ou avec les autres villages. Selon Nguyen Duy Thieu, comme la pô lan est une grande connaisseuse des affaires religieuses et villageoises, elle force l’admiration des villageois: «Autrefois, la cheffe du village était propriétaire des terres. Chaque année, accompagnée de ses assistants, elle se rendait chez chaque villageois pour percevoir des rentes foncières et pour voir comment les villageois avaient traité leur terre. En fonction de cela, elle allait organiser une cérémonie de culte. Dans la société moderne, ce sont les villageois qui élisent leur chef de village, qui peut être aussi un homme. Mais la tradition vaut toujours au niveau des familles où c’est la femme la cheffe.»

Le régime matriarcal des Ede reste l’un des plus typiques, parmi toutes les ethnies vietnamiennes. Et ce, malgré les échanges culturels et commerciaux qui ne cessent de s’amplifier.

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