(VOVWORLD) - À 13 ans, Manoé Grandvuinet incarne une nouvelle génération de prodiges du violon. Né en 2011 dans le Puy-de-Dôme, ce jeune franco-Vietnamien a déjà conquis le monde de la musique classique grâce à son talent exceptionnel et sa sensibilité rare. Récompensé à de nombreuses reprises, il nourrit aujourd’hui le rêve de faire résonner les notes de son instrument au Vietnam, terre d’origine de sa mère.
Manoé aux côtés de son tout premier professeur, le jour où il a commencé le violon, le 23 septembre 2017. |
Manoé Grandvuinet a découvert sa passion pour le violon de manière inattendue, à l’âge de cinq ans et demi, lors d’une animation scolaire. «Cela se passait dans une église où étaient réunies plusieurs écoles. À l’intérieur, un groupe de musiciennes et musiciens nous attendait pour nous faire découvrir une musique très ancienne nommée la Folia. Tous avaient des instruments de facture médiévale sauf une femme qui était violoniste. Quand je l’ai entendue jouer, j’ai ressenti l’intensité d’une émotion qui m’a transporté comme dans un monde parallèle où je me sentais infiniment heureux.» partage-t-il.
Même s’il a très tôt remarqué la passion de son fils, Dominique Grandvuinet ne s’imaginait pas que Manoé irait aussi loin. «J’ai bien sûr constaté sa passion au début, mais sans imaginer un seul instant une progression aussi fulgurante, jusqu’à être aujourd’hui, à 13 ans, en 3ème et dernier cycle du cursus professionnel au Conservatoire de Clermont-Ferrand, avec pour échéance l’an prochain l’examen du Diplôme National d’Enseignement Musical, qui lui permettra de postuler à un conservatoire national», confie-t-il.
Remise des prix du 40e Concours National de Lempdes : Manoé, en chemise blanche, parmi les lauréats |
Premier prix du 40e Concours National de Lempdes en avril 2025, Manoé avait déjà remporté ce même concours en 2023, ainsi qu’une deuxième place au Concours International FLAME à Paris. Des performances saluées par les professionnels, à l’image de la Présidente du jury, Cécile Moreau — violoniste professionnelle et professeure au Conservatoire régional de Toulouse: «Il m’a tout de suite touchée dans son jeu par sa finesse et sa sensibilité. Il a su nous montrer un bon phrasé, bien organisé, de mémoire, et j’ai tout de suite senti que Manoé avait compris comment était écrit ce Concerto, avec des passages très cadentiels, des chants vibrants ainsi que des passages techniques qu’il a su parfaitement assumer».
Manoé ne laisse rien au hasard. Sa discipline est impressionnante: Il consacre une vingtaine d’heures par semaine à la pratique de son instrument à domicile et au Conservatoire de Clermont-Ferrand et poursuit sa scolarité par correspondance. «Pour être plus précis, je vais chaque semaine durant trois jours au conservatoire — les lundis, mardis et mercredis — et parfois, lors des répétitions d’orchestre, jusqu’à six jours. Le temps consacré à l’instrument est en moyenne, et au minimum, de dix heures hebdomadaires au conservatoire et de vingt heures à domicile. Le tout avec, bien sûr, des contrôles et des auditions. » précise-t-il.
Son père, Dominique Grandvuinet, l’accompagne sans relâche, parcourant avec lui entre 400 et 1000 km par semaine pour les cours, les répétitions, les concours. «Si Manoé conserve ce feu sacré qui l’habite pour le violon, et s’il poursuit dans la même voie avec cette volonté constante de travail qu’il s’impose, j’imagine qu’il pourra réaliser l’impatience de ce rêve qui l’habite: devenir violoniste professionnel, et dans l’absolu, soliste international”, estime-t-il.
Malgré un emploi du temps exigeant, Manoé affiche une progression remarquable. Ses professeurs, Raphaël et Hélène Chenot parlent d’un élève «passionné et passionnant», toujours curieux d’explorer de nouveaux répertoires. “Il est en avance, et sa progression est régulière et rapide. Il a notamment beaucoup travaillé les pièces de genre de Sarasate, Wieniawski et Kreisler, ainsi que les classiques: Mozart, Haydn, Beethoven. Et maintenant, il commence l’apprentissage des concertos du grand répertoire», affirme Raphaël Chenot, qui suit Manoé depuis six ans.
À seulement 13 ans, Manoé porte sur la musique un regard d’une étonnante profondeur. Pour lui, le violon n’est pas qu’un instrument: c’est un lieu d’ancrage, un refuge intérieur. Là où d’autres trouvent leur équilibre entre les murs d’une maison, lui puise le sien dans la vibration des cordes, dans cet espace suspendu que crée la musique. Il nous livre ici une réflexion intime et poétique sur ce que signifie, pour lui, "habiter" son art: “«J’ai souvent entendu des personnes au tempérament sédentaire dire qu’elles se sentaient bien chez elles, entre quatre murs, dans leur maison, avec leurs habitudes rassurantes. Je comprends. Nous avons tous un chez-soi, un écrin familial. Une famille. Quand je dis pour ma part que je vis entre quatre cordes, ce sont bien sûr celles de mon instrument, devenu comme un prolongement de moi-même et qui, par ma passion musicale, a défini le cadre de mon quotidien et de mon existence. C’est un espace intemporel et immatériel qui me protège dans l’étreinte de sa sonorité et qui, dans son ambivalence, m’emporte et me transporte comme dans une partition où les notes sont dessinées sans être prisonnières, et peuvent s’échapper lorsque, avec mon archet, je réveille l’âme de mon violon.»
Manoé interprète “La liste de Schindler" lors de l’émission Prodiges sur France 2 |
Au-delà des prix, Manoé touche le cœur du grand public, notamment lors de l’émission Prodiges sur France 2, diffusée en décembre 2023, où il a interprété “La liste de Schindler” de John Williams. Il s’agit d’une compétition qui réunit de jeunes talents de toute la France. «Mon passage à Prodiges, qui fut mon premier passage à la télévision, a d’abord été un honneur, une chance et une expérience dans un décor grandiose, dont je garderai toujours l’émotion d’un souvenir féérique. Mes autres passages dans d’autres émissions ont prolongé ce plaisir, que je dois renouveler prochainement à l’invitation de FR3 Auvergne.», confie-t-il.
Le talent de Manoé ne laisse personne indifférent. Parmi ceux qui ont croisé son chemin, certains ont été profondément marqués par sa sensibilité et sa maturité musicale. C’est le cas de Violaine Prince, compositrice française et professeure émérite à l’Université de Montpellier: «J’ai rencontré ce jeune garçon et son père. Ce jeune prodige, ce jeune violoniste, il m’a beaucoup touchée. J’ai trouvé un jeune garçon d’une grande maturité, avec un sens musical exceptionnel, et j’aimerais beaucoup pouvoir lui écrire des pièces pour son violon” raconte-elle.
Manoé aux côtés de sa mère vietnamienne |
Fier de ses origines, Manoé rêve d’un jour donner un concert au Vietnam, pays de sa mère, qu’il a visité à l’âge de quatre ans. Il évoque souvent la cuisine vietnamienne, ses goûts pour le riz et son aversion pour le fromage avec humour. Mais au-delà de l’anecdote, il affirme ressentir un lien profond: «Je me sens lié avec le Vietnam, même si je ne suis pas très marqué physiquement, à l’exception de mes yeux un peu en amande et de mon petit nez, qui fait dire à mon père en me taquinant “ton petit nez vietnamien”. Je suis aussi vietnamien dans mes goûts culinaires. D’abord, ma maman, qui est une très bonne cuisinière, me prépare des plats aromatisés à la saveur de son pays. J’aime, et je mange beaucoup de riz. À l’inverse, je n’aime pas le fromage, alors que je vis en France, un pays de fromages», dit-il.
Manoé et son père en visite dans la baie d’Halong, en 2016. |
Son père, qui a passé vingt ans dans le pays, a nourri ce lien en lui racontant ses nombreux séjours, de Lang Son à Phu Quôc. «Il n’en est jamais vraiment parti», confie Manoé.
Porté par ses raciness, Manoé rêve de se produire au Vietnam — pays de sa mère, terre de souvenirs, de racines… et peut-être aussi, de débuts prometteurs sur la scène internationale.
“Donner un concert au Vietnam, ce serait d’abord venir dans cet autre «chez moi» et amorcer les prémices de ma «carrière internationale» en rencontrant sur place des virtuoses vietnamiens”, confie-t-il.
«Il est des moments où les rêves les plus fous semblent réalisables à condition d’oser les tenter », cite Manoé, reprenant Bernard Werber. Il a déjà l’audace. Il lui faut maintenant des soutiens, des scènes et des rencontres pour aller au bout de sa promesse : faire jaillir la beauté, non pas entre quatre murs, mais entre quatre cordes, sur toutes les scènes du monde.
Un rêve qu’il nourrit avec détermination — comme en témoigne son site www.manoe-violon.com, où l’on peut suivre son actualité musicale et ses projets à venir.