Les coopératives sont désormais considérées comme un maillon important de la chaîne qui relie les agriculteurs aux entreprises. C'est une nouveauté car jusqu'à une époque relativement récente, cette idée de connexion entre les différents acteurs de la production agricole faisait cruellement défaut, d'où de nombreuses difficultés en termes d'écoulement ou de garantie de la qualité. Lê Duc Thinh, directeur-adjoint du département de l’Economie coopérative et du Développement rural:

« Tant qu'il n'y a pas de chaîne de production, il est bien difficile de mobiliser des investissements ou de faire en sorte que les personnes concernées puissent s'entraider. Il est vraiment temps de mettre cette notion de "chaîne de production" au goût du jour. Il n'y a que comme ça que l'on peut espérer débloquer des crédits ou alléger les formalités administratives. »       

Les nouveaux modèles de coopérative qui commencent à voir le jour ici ou là présentent de nombreux avantages, et pas seulement celui de bénéficier d'assistances de l'Etat. Ces coopératives savent pouvoir compter sur le soutien des entreprises, comme nous l'explique Trương Hữu Trung, le président du conseil d’administration de la compagnie générale des produits minéraux de Hà Tinh:

« C'est aux entreprises qu'il revient d'élaborer de bonnes stratégies de marché, de créer et de promouvoir des labels. Elles le font dans leur intérêt, mais aussi dans celui des coopératives, des groupes de coopérants ou des simples agriculteurs avec lesquels elles collaborent et auxquels elles demandent en retour de se montrer rigoureux dans l'exécution des contrats. Il y va du développement durable de l’agriculture. »

Etablir une chaîne de production suppose un certain sens de la synchronisation, depuis le choix des semences jusqu'à la distribution des produits. Et c'est justement à ce niveau précis que les coopératives ont un rôle prépondérant à jouer: ce sont elles qui, d'une certaine manière, assemblent les maillons de cette chaîne, pour en faire ensuite une chaîne de valeur. Vo Kim Cu, président de l’Alliance des coopératives vietnamiennes:

« Notre travail, à nous, c'est de prendre contact avec les coopératives et les groupes de coopérants et de les responsabiliser, de bien leur faire comprendre que leur tâche ne se limite pas à livrer des marchandises à des entreprises, mais qu'il s'agit aussi de garantir la qualité des produits et même le prestige des labels. »   

Chacun l'aura donc compris, les coopératives sont appelées à travailler main dans la main avec les entreprises, et inversement: ainsi va la restructuration agricole en cours au Vietnam, qui n'a d'autre but que de créer des chaînes de valeur. Nguyên Thiên Nhân, président du Comité central du Front de la Patrie du Vietnam:

« Si on veut vraiment que la production agricole gagne en efficacité, il faut absolument créer cette connexion coopératives-entreprises. Ça fait déjà une bonne dizaine d'années qu'on en parle, alors il serait grand temps de faire ce qui doit être fait en termes de gestion étatique et surtout, de passer des paroles aux actes... »  

D’ici à 2020, l’Alliance des coopératives vietnamiennes envisage de créer entre 100 et 150 unions de coopératives fonctionnant sur cette idée de chaîne de valeur. Le gouvernement, lui aussi, compte aider à la création de 200 nouvelles coopératives dans différentes régions, et mettre ainsi en place une production marchande à grande échelle.   

Ce tournant auquel sont appelées les coopératives s'inscrit en fait dans la logique de la politique d'intégration au tissu économique mondial prônée par le gouvernement vietnamien. Seules, les coopératives ne seraient pas en mesure de faire face à la concurrence. Maillons d'une chaîne de production, elles deviennent aussi compétitives qu'efficaces.