(VOVWORLD) - Si les Ede, peuple des Hauts plateaux du Centre, préservent aussi bien leur patrimoine littéraire, c’est notamment parce que celui-ci existe sous forme de vers. Ce peuple a en effet l’habitude d’élaborer des messages en vers, que ce soit des prières, des conseils ou des épopées…
Les Ede ont l’habitude d’élaborer des messages en vers. Photo: VOV |
Les Ede appellent cette pratique de tout dire en vers klei zuê, klei signifiant parole et zuê voulant dire lien. Tous les genres littéraires existent sous forme de vers, affirme Linh Nga Niê Kdam, chercheuse en culture folklorique des Hauts plateaux.
«Les Ede ont une loi très ancienne composée de 2000 vers. À chaque fois qu’il fallait juger quelqu’un, on cherchait dans ces vers ceux qui correspondaient aux délits commis. Les chants populaires existent bien sûr en vers. La versification Ede est aussi particulière, très flexible», nous fait-elle savoir.
Les Ede parlent aussi en vers, lorsqu’ils se font des confidences ou lorsqu’une personne âgée donne des conseils à une autre, plus jeune. Et quand ils en ont l’inspiration, ils improvisent des vers qu’ils chantent, en jouant de la musique, ou en se faisant accompagner par un instrument. Qu’ils savent lire et écrire ou non n’a pas d’importance. Les vers sont bien évidemment plus faciles à mémoriser que la prose, comme le fait remarquer H Nai Niê, une Ede de Dak Lak.
«J’écoute les chants et je répète mentalement chaque morceau. Je le fais tout le temps, et c’est comme ça que je mémorise. Je ne sais pas écrire, donc je ne peux rien copier sur du papier. En revanche, les vers peuvent être facilement mémorisés et transmis aux autres, ce que je ferai avec mes enfants et mes parents proches», partage-t-elle.
Le maître chanteur Y Wang H Wing (milieu) chante en jouant de la flûte. Photo: VOV |
Celles et ceux qui interprètent des morceaux en vers devant un public sont des personnes qui ont le verbe facile, qui connaissent parfaitement les us et coutumes et qui ont envie de partager avec les autres des expériences accumulées depuis des générations. C’est le cas de Y Dhin Niê, qui est également de Dak Lak.
«J’ai une affection particulière pour les chants populaires et les contes de fée en vers. J’en ai beaucoup appris de la part des plus âgés, mais maintenant, il ne reste plus personne pour me les apprendre. C’est sans doute à mon tour de transmettre cette pratique et ce patrimoine en vers à la jeune génération», dit-il.
Dans son district, Cu Mgar, qui passe pour être le berceau de la culture traditionnelle Ede, Y Dhin Niê fait partie des 300 personnes qui interprètent en public des œuvres en vers anciennes. Un patrimoine certes transmis par voie orale mais préservé de tout cœur par les Ede, d’autant plus que cette pratique, klei zuê, a été classée au patrimoine culturel immatériel national.