(VOVworld) - Les « Puh ho drih », les rituels d’invocation à la paix des Bahnar, donnent lieu à de grandes cérémonies d’exorcisme, destinées à éloigner les diverses calamités - guerres ou épidémies, notamment - qui pourraient empêcher la communauté de jouir de la prospérité à laquelle elle aspire tout naturellement.
Pas plus tard que le mois dernier, le village culturel des ethnies vietnamiennes, qui se trouve en banlieue de Hanoi, a organisé un « Puh ho drih », un rituel d’invocation à la paix banhar. De très nombreuses personnes y ont d’ailleurs assisté, intriguées par ces rituels qui sont souvent célébrés en novembre ou en décembre, lorsque les récoltes sont achevées.
Autrefois, chez les Bahnar, les épidémies faisaient de terribles ravages. Les patriarches s’en remettaient alors à leurs Dieux, dont ils imploraient le secours et la protection au cours de grandes et fastueuses cérémonies. C’est ainsi que sont apparus les « Puh ho drih », comme nous l’a expliqué A Thut, un authentique Bahnar de la province de Kon Tum.
« On prie pour éloigner la maladie et la malchance du village, mais aussi pour s’attirer la richesse et la prospérité. »
L’effervescence règne dans le village, les jours qui précède la cérémonie. Les uns s’affairent à nettoyer les allées et surtout le rông (maison communale) qui doit être absolument impeccable le moment venu. Les autres préparent les figurines nécessaires au rituel, ainsi que des offrandes pour les divinités. Quant au bouc, animal sacré et frère de tous autres animaux du village, il vit paisiblement ses dernières heures, sans se douter qu’il sera sacrifié avec tous les égards qu’on lui doit.
Le jour J, les villageois affluent vers le rông. Le patriarche, qui tient lieu de maître des rituels, s’avance vers l’autel d’une démarche martiale, muni d’une épée et d’un bouclier, suivi d’un homme masqué et armé d’un coutelas à long manche. Les figurines, qui représentent en fait les forces maléfiques que l’on veut conjurer, sont quant à elles amenées par des jeunes hommes de robuste constitution.
Le patriarche invoque les forces célestes alors que les villageois dansent et crient pour chasser les âmes malfaisantes, avant d’aller jeter les figurines le plus loin possible, dans une ambiance électrisée par les tambours et les gongs. Quant au bouc, il fait office de victime expiatoire, non sans protester avec véhémence, dans une espèce de râle pathétique, qui est du meilleur effet sur le plan dramatique. Place maintenant au banquet ! Finies les grandes cérémonies, il est l’heure de ripailler à n’en plus finir et de boire jusqu’à en rouler par terre. Ma Lê, un Bahnar vivant à Hanoï :
« J’ai quitté mon village natal il y a très longtemps. Alors toutes ces danses… je suis très ému ! D’autant plus que c’est vraiment très authentique !... »
« Original, vivant, impressionnant… », nous dit Nguyen Hong Viet, un touriste, qui vient d’assister aux rituels.
« C’est vraiment impressionnant ! On a beau être en plein 21ème siècle, on est plongé dans un rituel un peu tribal, un peu ancestral… »
Un rituel, oui, c’est vrai, mais surtout une occasion de vider quelques jarres d’alcool et d’étripailler joyeusement une bestiole, laquelle a le vague sentiment confus de s’être fait rouler dans la farine et d’avoir servi de « bouc émissaire », dans toute cette histoire…
A la semaine prochaine pour de nouvelles pérégrinations ethnico-chromatiques.